J’ai pris pour acquis ce qui m’a été donné.
J’ai pris pour acquis ce qui m’a été offert.
Je veux qu’aujourd’hui ce qui m’appartient se détache de moi.
Je veux de moi me détacher de ce chemin,
Celui déjà tracé, celui qui rend compte de la torpeur du monde,
Ce monde qui bouge et change pendant que je ne change pas
Pendant que je ne change pas l’état du monde.
Ce monde auquel je m’adresse est celui qui est vain.
Non pas le monde qui résiste en vain à celui qui l’écrase,
Mais celui qui sur son chemin n’adresse à l’autre qu’une parole dépourvue d’espoir,
Celui qui inconsciemment lutte à rebours contre celui qui peine à le redresser en entier.
Simples sont les réponses aux interrogations incessantes qui pèsent sur les épaules
Des ignorants, des savants et de tous ceux entre les deux.
Mais à qui le rôle d’offrir délivrance à ceux qui n’ont pas la chance de sentir de près ces souffrances imminentes,
Ceux qui déjà attèlent et martèlent le journalier pour arriver, juste, à se démêler du venin de cette société.
Capital sur matériel, sur surconsommation, aberration.
Pour donner raison aux efforts futiles de cette lutte du quotidien,
Les yeux clos, mais grands ouverts, sont fermés sur ce qui leur est dicté comme solutions butoirs
Pour se sentir accomplis, assouvis, mais véritablement endormis.
Je me sens témoin absent, absurde,
Prude dans mon pouvoir à vouloir gravir par-delà de ce qui m’est présenté.
Je suis confus par ce qui me semble logique,
De par la multiplication de sophismes modernes
Qui proposent des réalités distorsionnées.
À quoi bon discerner le bien d’entre le mal
Quand le Bien se faillit à lui-même dans une teneur polarisée:
Démocratie, tyrannie, porte-étendards de valeurs véritables
Où la vérité s’impose comme vecteur d’égo,
Où l’injustice de l’un fait la quiétude de l’autre.
Vision pessimiste ou vision en brouillard?
Faut-il voir plus grand, faut-il mettre sa foi dans une spiritualité aveugle
Pour qu’enfin s’apaise en nous, en moi, cette pression défaillante d’une voix brisée,
D’une route consumée par la montante des étalages médiatiques acryliques.
Je vois en moi ce garçon qui était berné,
Cet adolescent fragilisé dans l’effort à percevoir la réalité de son sort,
Ce jeune homme à bout de souffle dans la matérialisation de ce constat.
Enfin, cet artiste franchissant la piste du oui ou du non,
De la raison dans son état déraisonné
Qui porte au cou une mélancolie ordonnée.
Je dois créer, sans quoi je m’effondrerai.
Je dois créer, sans quoi je suis subordonné
Aux positions rêches des états malmenés
Par des puissances âcres et centralisées.
À qui de droit, j’ai tous les droits
D’un homme qui prêche sur tous les toits
Qui hurle d’un silence pantois
Son unique résolution, ivre de désarrois.
Je crois fermement que la création, dans son essence, est primaire à l’humain dans son développement individuel et global. Les idées nouvelles, de par la synthétisation de connaissances cumulées, et au travers d’une opinion critique soutenue menant à des conclusions neuves sur l’avenir du monde, sont vectrices de progrès. Mais cette structure de croissance, voire de surcroissance, qui prédomine notre ère anthropocène, est exponentielle et repose dans sa finalité sur l’extraction imminente totale des ressources naturelles.
La plus grande des âmes
Qui respire l’air des ères qui passent
Parfois convenue, parfois aiguë,
Se distingue de par sa volonté
À rendre compte des maux sans mots,
Qui perdure, habillée de différentes parures
S’attachant au fil glissant du temps qui tend
À laver ce qui reste du reste des jours à vivre.
Comment puis-je poursuivre de manière intrinsèque cette passion qui fait de ma vie celle que j’ai choisie? Comment puis-je allier la notion d’une éventuelle fatalité terrestre humanoïde à ma conviction que la création pure reste la plus grande force de l’Homme?
Si seulement le cillement
De la dureté du ciment,
Loin d’être convenu ou élégant,
Brusquait son minage dominant.
Pour que montant et germant en moi
Les pleurs des cernes sans lueur
Qui incarnent et rappellent ladite bonne nouvelle,
Pressent à ce que s’émisse comme telle
L’hymne de l’infini sublime.
Considérant la science comme modèle temporaire aux questionnements physiques et tangibles du monde par observations vérifiables,
Alors que l’infiniment petit, comme l’infiniment grand, sont toujours hypothétiquement irrésolubles,
Nous, femmes et hommes, savons précisément peu de choses.
Mais nous disposons du savoir que sur cette Terre que nous habitons, il règne balance et équité,
Avec, ou sans nous.
Et puisque rien ne vient de rien et que rien ne finit (en) rien,
Pourquoi creuser frontières sur frontières sur cet ensemble
Sur ce globe qui ne fait qu’un avec ses composantes.
Parce que d’un regard épiphénoméniste
Où décisions, conscience et actions font fausse route à la liberté des idées,
Car les idées se forment avant la prise de conscience,
Parce que la conscience se trompe de sa liberté,
Parce que l’illusion est aussi consciemment illusoire.
Alors comme pris dans ce jeu, sur cette fine ligne entre ce qui est réel et nominal,
Créer semble renverser la raison de ce qui essentiellement laisse à croire que notre existence
N’est en somme que réactions à notre entourage, immédiat ou lointain,
Dans notre relation empirique constante et renouvelée.
La création comme solution
La création comme exutoire
La création comme salvation
Être heureux, figure de style d’oxymores.
Être heureux, état de satisfaction.
État où l’on ne souhaite que rien ne soit différent à cet instant,
Où la vulnérabilité l’emporte sur le reste
Sans défense, prêt à se laisser absorber par ce qui est
Juste là, parce que.
Parce qu’être malheureux est une relativisation négative d’un choix de posture,
Parce que la souffrance ne fait pas état de notre état,
Mais est contenu dans ce vaste contenant.
La balance se place dans l’harmonie du binaire
L’harmonie s’enracine dans le respect de l’ensemble
Et les plus belles choses méritent le silence.